mercredi 19 août 2009

Les dissidents Antillais(3) :L'exemple de Jean-Marie Boijot:Un cas pratique d'une catégorie de saigneurs des dissidents

Des pêcheurs profiteurs de la situation se sont enrichis sur le dos de nos parents lors de cette période de rupture avec l'ordre établi par le Gouverneur Constant Sorin .Son témoignage!ÉVASION DE LA GUADELOUPE EN 1943.Sous le régime de Vichy depuis le 12 février 1942, je me trouvais en service à la Guadeloupe— Saint-Claude — à la compagnie d’Infanterie Coloniale de la Guadeloupe (C.I.C.G.), comme sous-officier sergent et cherchais discrètement à rejoindre l’île anglaise de la Dominique pour me mettre à la disposition du Général De Gaulle afin de poursuivre la lutte contre l’Allemagne nazie.Je réussis à me faire désigner par le Commandant de la C.I.C.G. de Saint-Claude comme chef de poste au Fort Napoléon à l’Ile des Saintes. Il y avait plus de possibilités de rejoindre de cet endroit l’Ile de Dominique que de Basse-Terre. Le Fort Napoléon était destiné, à cette époque, à faire surveiller par les gendarmes des Saintes les guadeloupéens qui avaient été pris lors d’une tentative d’évasion de la Guadeloupe pour rejoindre l’Ile de la Dominique. Ma mission au fort consistait à m’occuper uniquement de l’administration et du ravitaillement de la section qui était sous mes ordres; mais j’étais étroitement surveillé et contrôlé par la Gendarmerie des Saintes qui avait toute autorité au Fort Napoléon.En défiant la surveillance des gendarmes qui connaissaient bien mes idées gaullistes, et après de nombreuses tractations discrètes avec les pécheurs de l’île, je réussis en payant à trouver un pécheur-passeur disposé à me transporter à l’Ile de la Dominique avec son bateau à voiles de huit mètres. Un accord entre lui et moi fut verbalement conclu pour mon transport dans la nuit du 20 au 21 mai 1943. Je lui versais par avance la somme de 35.000 Fr. de l’époque.Le soir du jour J —20 mai— je bouclais fiévreusement mes valises et demandais, vers 21h30, à huit soldats en qui j’avais entière confiance s’ils voulaient m’aider à transporter du Fort au village de Terre du Haut mes valises remplies de quelques vêtements, de documents relatifs à l’installation et à l’organisation du Fort Napoléon ainsi que de deux pistolets mitrailleurs et de deux revolvers avec leurs munitions. Ces huit soldats ont répondu favorablement à mon appel en me disant " Sergent, vous partez à la Dominique et nous voulons partir avec vous ". Je ne pouvais faire mieux que d’accepter à condition que le pêcheur-passeur fût d’accord.En trompant la surveillance du gendarme de permanence, ce 20 mai, vers 21h45, je descendis du Fort vers le village de Terre du Haut avec mes huit volontaires et complices pour rejoindre l’endroit du rendez-vous, au bord de la mer. Nous traversâmes le village, passâmes devant la Gendarmerie, courant le risque d’être repérés et arrêtés et de nous retrouver en prison au Fort. Heureusement nous passâmes tous, sans un mot, faisant le moins de bruit possible, sans éveiller l’attention du gendarme en faction, et nous retrouvâmes à l’endroit du rivage que m’avait indiqué le pêcheur. Il nous attendait. Loyal, il ne m’avait pas dénoncé à la Gendarmerie et mes dernières craintes de me voir reprendre le chemin du retour, menottes aux poings, s’envolèrent.Le pêcheur, m’apercevant dans l’ombre avec mes huit bonshommes, leva les bras au ciel. " Nous allons sombrer en mer des Caraïbes à dix hommes sur une barque de huit mètres de long " et ne voulut plus partir. Après un bon quart d’heure de palabres, il accepta enfin de nous prendre tous les neuf à bord. Pour cela je lui avais proposé de lui remettre encore tout l’argent qui me restait, environ 10.000 fr. Le risque était trop grand pour reculer. Lorsqu’il eut accepté, je lui remis la somme. Ce petit voyage lui rapportait 45.000 fr.Allègrement nous nous sommes mis à pousser la barque vers la mer, nous sommes montés, bien serrés les uns contre les autres, l’eau arrivait à 20 cm environ du bord. Mais nous étions trop heureux de partir pour y penser.Nous nous sommes éloignés doucement du rivage à la rame, puis ensuite un peu au large, la voile fut hissée. Heureusement il n’y avait que peu de vent et pas de grosses vagues pour nous faire chavirer. Ce qui ne nous empêchait pas d’écoper en permanence.Le voyage en mer dura toute la nuit et toute la matinée du lendemain. Nous arrivâmes vers 15h le 21 mai, tout trempés et transis, à l’Ile de la Dominique où je me présentai aux autorités anglaises, très heureuses de nous accueillir avec armes et documents. Là, nous avons tous été habillés de vêtements secs et nous avons tous contracté, immédiatement, un engagement pour la durée de la guerre dans les Forces Françaises Libres aux ordres du Général De Gaulle.Ensuite je fus chargé du commandement du détachement de troupe formé à 1’île de la Dominique. Plus tard nous avons rejoint l’Amérique, via Cuba et les îles des Caraïbes.Après un intense entraînement en Amérique, à Fort-Dix dans le New-Jersey, nous sommes repartis en convoi sur l’Atlantique vers l’Afrique et nous avons participé aux campagnes de Tunisie, d’Italie et de France au 2lème groupe de D.C.A. antillais.Monsieur Jean-Marie BOISJOTCroix de guerre 39-45 - Croix du Combattant Volontaire de la RésistanceMédaille de la Résistance - Médaille des Evadés - Médaille F.F.L. - Médaille MilitaireChevalier de l’Ordre National du Mérite

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